Critique de la nouveauté
J'ai tout récemment passé un oral d'entrée à Sciences-Po (pour le master de l'école de la communication) et un échange m'a particulièrement marqué. La question était la suivante "Dans l'art comme dans la publicité sur quoi serez-vous jugé au final ?" Dans un esprit Andy Warhol j'ai répondu la capacité à vendre. Non, la réponse c'est la capacité à faire du nouveau. Car "la nouveauté est aujourd'hui le seul critère de jugement objectif qu'il nous reste."
Je n'ai pu m'empêcher d'argumenter contre cette idée.
Dans le domaine de l'art, bien que chacun cherche à développer une identité plastique, rares sont les artistes qui peuvent prétendre faire quelque chose de fondamentalement nouveau. Toutes les pratiques s'appuient sur des réalisations antérieures qu'elles arrivent à assimiler et à transformer. L'idée du nouveau, d'un absolument original, complètement inédit est d'autant moins pertinente dans le champs de l'art que celui-ci est de plus en plus ouvertement citationnel. Pour reprendre l'idée de Bourriaud dans Postproduction, les jeunes artistes créent des pièces comme les DJs de la musique, à partir d'autant de fragments de leur répertoire culturel, qu'ils mixent comme des samples.
Quel mouvement aujourd'hui n'est pas néo ou post quelque chose ?
Si l'idée de nouveauté me semble hautement discutable dans le champ de l'art qu'en est-il alors du champ de la publicité ? S'il y a bien un univers qui tourne à vide c'est celui de la pub. Combien de fois avez-vous été vraiment étonné, séduit par une campagne ? Le recyclage d'idées y est monnaie courante comme le démontre le livre de Joe la pompe (lire l'article en suivant ce lien).
"Lorsque vous achetez un ordinateur vous ne faites donc pas attention au fait qu'il soit nouveau ?" (question du jury).
Bah si, mais nouveau n'a plus le même sens ici. C'est à dire que le nouveau devient ici le récent et/ou le neuf, par opposition au vieux/obsolète.
Mais fondamentalement en quoi mon nouvel ordinateur est-il différente de l'ancien ? Y-a t-il eu le moindre changement conceptuel qui ferait de lui autre chose ? N'est-il pas simplement l'ancien avec de meilleures performances ?
Pour rester dans le domaine des produits de grande consommation et des nouvelles technologies, comment les adeptes de la nouveauté expliquent-ils les échecs du Laserdic ou du MiniDisc (formats tout aussi "révolutionnaires" à leurs sorties que le CD et le DVD) ?
Je me souviens d'une interview lue il y a longtemps dans un magazine gratuit (du type qu'on trouve dans l'avion) où l'un des fondateurs de Ben &Jerry's expliquait qu'il n'y a que très peu de véritables inventions. Une poignée d'idées de génie par siècle peut-être et que par conséquent plutôt que de passer sa vie à la recherche d'une nouveauté il était bien plus sage de faire quelque chose de relativement commun (des crèmes glacées dans le cas présent) mais en augmentant la qualité. Cette direction a été depuis empruntée par d'autres grandes chaînes comme Starbucks dont un des éléments de communication est l'origine commerce équitable de ces produits.
Il y a bien sûr une nouveauté relative. Pour les artistes comme pour les communicants le succès vient de leur capacité à saisir avec finesse l'air du temps. La force de l’œuvre réside dans sa capacité à révéler le monde, ce qui, de facto, l'enracine profondément dans son contexte. Une création ex nihilo est condamnée à l'échec car elle ne parlera à personne.
Je n'ai pu m'empêcher d'argumenter contre cette idée.
Dans le domaine de l'art, bien que chacun cherche à développer une identité plastique, rares sont les artistes qui peuvent prétendre faire quelque chose de fondamentalement nouveau. Toutes les pratiques s'appuient sur des réalisations antérieures qu'elles arrivent à assimiler et à transformer. L'idée du nouveau, d'un absolument original, complètement inédit est d'autant moins pertinente dans le champs de l'art que celui-ci est de plus en plus ouvertement citationnel. Pour reprendre l'idée de Bourriaud dans Postproduction, les jeunes artistes créent des pièces comme les DJs de la musique, à partir d'autant de fragments de leur répertoire culturel, qu'ils mixent comme des samples.
Quel mouvement aujourd'hui n'est pas néo ou post quelque chose ?
Si l'idée de nouveauté me semble hautement discutable dans le champ de l'art qu'en est-il alors du champ de la publicité ? S'il y a bien un univers qui tourne à vide c'est celui de la pub. Combien de fois avez-vous été vraiment étonné, séduit par une campagne ? Le recyclage d'idées y est monnaie courante comme le démontre le livre de Joe la pompe (lire l'article en suivant ce lien).
"Lorsque vous achetez un ordinateur vous ne faites donc pas attention au fait qu'il soit nouveau ?" (question du jury).
Bah si, mais nouveau n'a plus le même sens ici. C'est à dire que le nouveau devient ici le récent et/ou le neuf, par opposition au vieux/obsolète.
Mais fondamentalement en quoi mon nouvel ordinateur est-il différente de l'ancien ? Y-a t-il eu le moindre changement conceptuel qui ferait de lui autre chose ? N'est-il pas simplement l'ancien avec de meilleures performances ?
Pour rester dans le domaine des produits de grande consommation et des nouvelles technologies, comment les adeptes de la nouveauté expliquent-ils les échecs du Laserdic ou du MiniDisc (formats tout aussi "révolutionnaires" à leurs sorties que le CD et le DVD) ?
Je me souviens d'une interview lue il y a longtemps dans un magazine gratuit (du type qu'on trouve dans l'avion) où l'un des fondateurs de Ben &Jerry's expliquait qu'il n'y a que très peu de véritables inventions. Une poignée d'idées de génie par siècle peut-être et que par conséquent plutôt que de passer sa vie à la recherche d'une nouveauté il était bien plus sage de faire quelque chose de relativement commun (des crèmes glacées dans le cas présent) mais en augmentant la qualité. Cette direction a été depuis empruntée par d'autres grandes chaînes comme Starbucks dont un des éléments de communication est l'origine commerce équitable de ces produits.
Il y a bien sûr une nouveauté relative. Pour les artistes comme pour les communicants le succès vient de leur capacité à saisir avec finesse l'air du temps. La force de l’œuvre réside dans sa capacité à révéler le monde, ce qui, de facto, l'enracine profondément dans son contexte. Une création ex nihilo est condamnée à l'échec car elle ne parlera à personne.
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